L'Escort 1800 groupe 2 que Jean-Claude
Lefèbvre utilise en course de côte et dont nous avons pu faire l'essai à Montlhéry a
été achetée en 1971 chez British Vita Racing Team en Angleterre. Elle est équipée du
moteur Ford Cosworth BDE 1800 de 245 chevaux, ce qui n'est pas tout à fait le « dernier
cri » puisqu'il existe maintenant, en groupe 2, un 2 litres « bloc alu » de 270
chevaux. 
Description technique :
Quelles sont les différences essentielles entre cette groupe 2 et une groupe 1 ?
L'Escort a un bon atout initial : elle est légère et peu encombrante. son poids
d'homologation est à 790 kg. En fait, ce poids n'était accessible qu'avec l'aide
d'artifices comme les ailes et portières en plastique qui ne sont plus homologuées en ce
qui concerne l'Escort. Aussi l'Escort de Lefèbvre pèse-t-elle 850 kg (à titre indicatif
une Mexico de série pèse 890 kg).
La caisse reçoit de nombreux renforts, notamment au niveau de la suspension, laquelle n'a
plus grand chose à voir avec celle d'une Escort normale. Ainsi à l'arrière, si les
ressorts à lames subsistent, ce n'est que pour respecter le règlement. En fait ils
n'agissent plus et ne sont que figuratifs : quelle façon éclatante de ridiculiser (tout
en les détournant) les règlements !
Des
combinés ressorts-amortisseurs De Carbon réglables prennent appui sur une pièce en
acier prolongeant l'essieu de chaque côte vers le bas. Leur réglage permet de faire
varier la hauteur de caisse. L'essieu arrière est toujours
rigide mais ce n'est plus le même : on a monté celui de la Capri 2600 RS qui est
homologué et il est fermement guidé, latéralement et longitudinalement, par un
parallélogramme de Watt.
La suspension avant se compose d'un simple bras inférieur et d'un combiné
ressort-amortisseur De Carbon. Cela manque évidemment de guidage mais il serait possible
de monter des barres de poussée avec lesquelles la voiture serait certainement beaucoup
plus stable sur mauvais revêtement. A l'avant se trouve également une barre
stabilisatrice. L'Escort de Lefèbvre est équipée de jantes BBS de 13 pouces de
diamètre et de11 pouces de largeur à l'avant pour 12 pouces à l'arrière, chaussées de
pneus Dunop slick 245/500 et 260/500.
Les freins reçoivent 4 disques plus gros avec des pinces Girling. Détail
intéressant : Jean-Claude n'a jamais changé ses plaquettes depuis 1971, il est vrai que
la voiture n'a effectué que 2 courses en circuit et 25 courses de côte ce qui, au total,
représente à peu près 400 ou 500 kilomètres d'utilisation !
Le moteur 4 cylindres Cosworth de 1780 cc très exactement, 4 soupapes par cylindre,
double arbre à cames en tête, est issu du bloc RS1600 qui peut d'ailleurs être
réalésé jusqu'à 1860 cc.
Une boite ZF 5 vitesses lui est accolée, avec un couple très court (4x83) adapté aux
courses de côte où ii faut de très fortes accélérations mais où une vitesse de
pointe relativement faible suffit.
Avec ce couple,
l'Escort de Lefèbvre plafonne à 175 km/h à 9000 tours/minute en cinquième.
Pour en finir avec la description de ce bolide, notons la présence, dans le coffre AR
d'un gros réservoir souple de 90 litres. On dira que c'est beaucoup pour faire de la
côte, mais ce réservoir ne pèse pas plus qu'un petit réservoir de10 litres en alliage
!
Alors, à quoi bon s'en passer ?
La roue de secours est fixée derrière le baquet du pilote, à côté de
l'extincteur.
Double surprise en prenant place au volant de l'Escort : la conduite est à droite et le
levier de vitesses à main gauche; et surtout, le siège baquet est à la taille de
Jean-Claude Lefèbvre lequel, tout déplié, mesure un bon 1,90 m.
Ce ne serait pas grave si ce siège était... réglable.!
Une quadruple épaisseur de blousons ne suffira pas à nous procurer une position de
conduite convenable. Tant pis : c'est bras très
tendus que j'effectue les mesures d'accélération ou plutôt "la" mesure car un
kilomètre départ arrété n'aurait aucun sens, notre Escort atteignant 9000 tours en
cinquième avant même de passer aux 400 mètres !
Au volant
Contact, pompe à essence, démarreur : le
4 cylindres part au quart de tour, 3000 tours suffisent pour embrayer et déplacer
la voiture, mais pour faire un départ-canon, style course de côte, il faut maintenir
l'aiguille du compte- tours aux environs de 8000 tours et embrayer assez sèchement. Rien
à craindre, l'embrayage est solide. Mais croyez moi, une telle manoeuvre met de
l'ambiance dans l'habitacle. Si le démarrage est réussi, l'aiguille du compte-tours ne
redescend pas : ce sont les roues qui patinent.
La première est longue, les 4 autres rapports sont très rapprochés et avant de
franchir la ligne démarquant les 400 mètres, nous sommes en 5e, compte-tours à 9000 :
il faut lever le pied pour ne pas dépasser ce régime limite car le moteur, lui, ne
demande qu'à continuer.
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L'Entretien
Avec cette voiture, J.-C. Lefèbvre a participé à 2 courses en circuit
en1971 puis à une trentaine de courses de côte depuis 1972.
A part un moteur cassé, au tout début à la suite d'un défaut de lubrification
du vilebrequin, sa voiture n'a exigé, pout tout entretien qu'un rodage de soupapes et
quelques vidanges. Il est à noter que cette voiture a été préparée et entretenue par
le garage Riche à Belfort.
A titre indicatif, notons qu'un bloc moteur
coûte, rendu en France, 2 000 F, un vilebrequin 3 500 F, une soupape 80 F, un piston 200
F. .
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Et si la
puissance n'est pas ridicule de 4000 à 7000 tours, les 245 chevaux s'expriment avec
violence, dans un bruit suraigu, de 7500 à 9000 tours. La fureur des montées en régime
après chaque passage de vitesse, les sauts de cabri de l'Escort surbaissée sur le
revêtement inégal de l'anneau de Monthléry laissent l'impression d'être propulsé dans
un bolide infernal. Ce n'est d'ailleurs pas seulement une impression comme en témoigne le
chiffre relevé :
- de 0 à 400 mètres en 13"6,
Mesure effectuée en conservant une certaine méfiance à l'égard de la boîte de vitesse
du fait de notre manque d'habitude à manipuler un levier à gauche et en tirant un peu
moins de 9000 tours sur les intermédiaires. Cette voiture est certainement capable de
réaliser 13"2 ce qui serait un temps fabuleux comparé aux13"4 d'une Pantera
groupe 3 ou aux 13"3 d'une Ferrari Daytona groupe 4!.
Pour les raisons exprimées plus haut, nous ne mesurons pas la vitesse maximum mais il est
certain que cette voiture atteindrait certainement pus de 240km/h avec un couple conique
adapté.
Nous voici sur le circuit routier où nous allons souvent devoir lever le pied pour
éviter de dépasser les 9000 tours, en cinquième. Le levier de vitesses est ultra court
mais les vitesses passent avec une précision et une rapidité exemplaires. Le bruit du 16
soupapes est effrayant. A la cuvette, l'Escort
bondit sèchement mais aucun problème pour la remettre en ligne : elle est légère et
extrêmement maniable.
Seule la direction est un peu dure mais sans doute cela nous apparait-il ainsi du fait que
nous sommes contraints de conduire les bras très tendus et que nous manoeuvrons le volant
du bout des doigts ! Pour bien utiliser le moteur il ne faut jamais laisser le régime
tomber au-dessous de 7500 tours ce qui pose un problème d'appréciation au début, les
rapports étant très rapprochés, la voiture manque un peu de stabilité dans la ligne
droite de la forêt où le revêtement est en mauvais état : des
barres de poussée montées sur le train avant remédieraient probablement à ce défaut.
Il faut dire que la suspension, très sèche, n'est pas
adaptée à ce genre de revêtement. L'Escort s'avère sous-vireuse à l'entrée des
virages serrés et survireuse dans les grandes courbes, ce qui est un comportement
d'autant plus excellent que dans tous les cas elle reste extrêmement maniable et facile
à contrôler, même dans de larges glissades. si le terrain est plus étriqué comme à
la course de côte du Colombier (près de Montélimar) par exemple, Lefèbvre
diminue légèrement la pression des pneus arrière (1,6/1,8 au lieu de1,6/2 kg)
ce qui rend la voiture plus uniformément survireuse. En revanche, dans tous les cas, il
faut se méfier sur sol mouillé où le comportement devient très pointu et où les
glissades incessantes du train arrière deviennent très délicates à contrôler,
d'autant plus délicates que la puissance s'exerce avec brusquerie au-delà de 7000 tours.
Les freins sont efficaces et endurants et on a tendance, au début, à sous-estimer leur
efficacité et à freiner un peu trop tôt.
Nous avons essayé beaucoup de voitures spéciales depuis trois ans mais peu d'entre elles
nous ont laissé un tel sentiment d'avoir conduit un pur sang.
Certaines voitures comme la Porsche Carrera 3 litres groupe 4 ou la Fiat128
Filipinetti par exemple... : l'Escort est
donc en bonne compagnie ! Un dernier détail : ce pur sang coûte onze millions* quand
même....
* (NDW 110 000 F mais nous
sommes en 1974 )
Pierre Pagani
Voir la restauration de cette voiture ici
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES Moteur : Ford Cosworth BDE - 4 cylindres en ligne -
Cylindrée 1780 cm3 - Alésage x Course : 85 x 77,72 mm -
Puissance maxi : 245 cv/ 8500 trs - Puissance spécifique : 135 cv au litre - Distribution
: 2 ACT entrainés par courroie crantée - Alimentation : injection Lucas -
Refroidissement : eau - Graissage : carter sec - Vilebrequin : 5 paliers - Culasse
: aluminium 16 soupapes - Bloc : fonte - Equipement électrique : 12 v Lucas
Transmission : Embrayage Borg and Beck
bi-disque - boîte ZF 5 vitesses
Suspension : AV : type McPherson avec combinés amortisseurs,
ressorts DeCarbon et barre stabilisatrice. AR : Essieu rigide - Combiné ressorts
amortisseurs DeCarbon.
Freins : 4 disques ventilés
Direction : crémaillère
Roues : jantes BBS 11x13 AV et 12x13 AR.
Pneus Dunlop 245/500/13 et 260/500/13
Dimensions/Poids : L: 3,88m l:1,57m H:1,25m
Empattement : 2,39m Voies AV/AR 1,24/1,27m Poids : 850kg
Capacités : réservoir souple de 90l.
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voiture ici
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